Adémar Martens, ça vous dit quelque chose ? Je vous mets sur la voie : c’est un dramaturge belge – proche d’Antonin Artaud – qui a vécu de longues années dans la commune de Schaerbeek (au 71 de la rue Lefrancq), et dont le nom d’artiste est Michel de Ghelderode. Cela ne vous dit toujours rien ? Ne vous en faites pas. C’est normal : ses pièces sont peu connues et peu jouées en Belgique, et cela malgré la reconnaissance planétaire de son oeuvre.
Auteur prolifique, il a écrit, entre 1918 et 1960, pas moins de 51 pièces de théâtre, sept pièces pour marionnettes (notamment pour le théâtre Toône) et une douzaine de contes et d’oeuvres lyriques. Si je vous en parle aujourd’hui – avec un peu de retard – c’est parce qu’on célébrait l’année passée les 50 ans de sa disparition.
« Ghelderode, c’est le diamant qui ferme le collier de poètes que la Belgique porte autour du cou. Ce diamant noir jette des feux cruels et nobles. Ils ne blessent que les petites âmes. Ils éblouissent les autres. » — Jean Cocteau
Les pièces de Ghelderode (comme l’Escurial) ont été traduites en vingt langues, dont le néerlandais, l’allemand, l’italien, l’espagnol, le portugais, l’anglais, le polonais ou encore le roumain. Elles sont jouées à sur les planches de Rome, Milan, Amsterdam, Dublin, Prague, Cracovie, Londres, Madrid, Oslo, Copenhague, New York, Chicago, Buenos Aires, Rio de Janeiro, Bogota, Montréal ou encore Tel Aviv (cf. Wikipedia).
Une des pièces les plus célèbres du dramaturge bruxellois, intitulée « La balade du Grand Macabre » (jouée ici en vietnamien par les étudiants de l’université de Hanoï) a été adaptée à l’opéra par le compositeur roumano-hongrois György Ligeti. Le grand macabre raconte l’histoire de Nekrotzar, un personnage qui parcourt le pays imaginaire de Brueghelland en annonçant la fin du monde. Je vous avertis : Ghelderode, ce n’est peut-être pas tout à fait recommandé si vous êtes d’un naturel anxieux (… même si vous êtes plutôt du genre « grande âme éblouie »).
« Autant ses personnages étaient violents, macabres, irrespectueux, autant Michel de Ghelderode, homme timide et solitaire, était peureux et angoissé. Cet ancien fonctionnaire de l’administration communale de Schaerbeek disait aimer les hommes, mais de loin. A peine avait-il quitté la conversation d’un ami, qu’il éprouvait le besoin d’aussitôt lui écrire » (Schaerbeek-Info, n°83, 2009).
Au fait, si vous êtes de passage à Asunción au Paraguay cette semaine (sait-on jamais), rendez-vous vendredi soir, au Théâtre de Manzana de la Rivera à 20h. Vous assisterez à une version latino du Cavalier bizarre (en espagnol, El Extraño Jinete« ) de Michel de Ghelderode.